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Le secteur de l’énergie électrique au Bénin, particulièrement durant cette dernière décennie, a connu très peu de développement, face à une demande de plus en plus croissante. La conséquence directe de cette situation est un délestage incessant qui impacte négativement tous les secteurs d’activités, dont celui industriel. L’option d’autres sources d’énergie notamment les énergies renouvelables constitue le meilleur espoir des populations pressées d’avoir une autonomie énergétique.
Dans l’impossibilité de bénéficier de l’énergie conventionnelle commercialisée par la Société béninoise d’énergie électrique (SBEE), Henry Hadji, technicien en génie civil fait recours au solaire photovoltaïque. « Je n’ai pas pu avoir accès au réseau électrique à cause d’un malentendu avec le chef d’agence de la SBEE de la localité. Pour avoir été déçu de la non-satisfaction de ma demande d’abonnement depuis plus de six mois, mon dossier a été simplement classé. Malgré tous mes efforts, rien n’y fit. J’ai dû faire recours aux panneaux solaires pour permettre à mes enfants d’étudier sans difficulté les soirs », explique-t-il. Comme Henry, ils sont nombreux dans le cas à ne pas avoir accès à l’énergie électrique. Aujourd’hui, le mythe est rompu à cause de la révolution dans le solaire photovoltaïque. Infirmier à Kpokissa dans la commune de Zogbodomey, Éric Kpanou a pendant des mois voire des années soigné les patients la nuit avec des lampes torches et lanternes. Aujourd’hui, il manifeste sa joie de pouvoir travailler aisément en toute sécurité grâce à la lumière produite par les panneaux solaires. « Vous voyez avec moi, je suis sous la lumière du panneau solaire qui brille et on a déjà commencé par recevoir des malades la nuit sans peine, sans difficulté », affirme-t-il. L’arrivée de l’énergie électrique reste une joie pour tout le village surtout les agents de santé qui faute de lumière, n’arrivent pas à remplir leur devoir. « Ça nous arrange et nous facilite vraiment la tâche. Nous avons même un frigo, offert par l’entreprise qui a installé les panneaux et c’est ce qui nous permet de conserver les vaccins que nous administrons aux enfants et aux femmes enceintes », confie Éric Kpanou.
L’heure du sourire
A l’instar d’Éric, d’autres citoyens bénéficient de l’énergie électrique grâce au solaire photovoltaïque. Président du comité de suivi du champ solaire dans le village de Oké Owo, dans la commune de Savè, Louis Dossou se dit très satisfait de ce projet qui a permis à la population de son village d’avoir accès aussi à l’énergie électrique. « Depuis que l’énergie solaire est installée dans le village, tout le monde est heureux. Même les élèves, pour une simple photocopie, sont tenus d’aller jusqu’à Savè qui est à 30 km environ avant de pouvoir photocopier une page d’épreuve ». Ce calvaire vécu par les élèves, enseignants et parents d’élèves est désormais allégé. « Depuis que les panneaux solaires sont installés, Dieu merci, il y a des frères qui ont acheté et installé ces appareils. Ce qui a allégé la tâche non seulement aux enseignants mais aussi aux élèves qui sont contraints d’avoir les photocopies des documents avant de travailler puisque le programme de l’Approche par compétence l’exige », justifie-t-il. Comme pour montrer sa joie, il ajoute : « il n’y a plus de ces buvettes qui ne fonctionnent plus ici 24h/24. Si vous voulez de l’eau fraîche, les boissons fraîches, vous en trouverez partout contrairement à la situation d’il y a quelques mois. Avec l’efficacité des panneaux solaires, on voit qu’il y a espoir puisque le courant est permanent et il n’y a pas de coupure ». Une joie partagée aussi par Ibrahim Yarou Sidikan, conducteur de taxi-moto à Kika dans la commune de Tchaourou. Pour ce dernier, « on ne peut pas parler aujourd’hui de développement sans l’énergie. Depuis l’arrivée de ces panneaux solaires, on sent une nette amélioration de nos revenues ». Mohibi Fanou, cultivateur à Kpokissa est aussi dans la même dynamique. Il se réjouit d’avoir accès à l’énergie et pouvoir suivre les émissions télévisuelles comme ceux des autres villes du Bénin. « Ma maison est située à plus d’un kilomètre du réseau électrique et je n’ai pas pu avoir accès au raccordement. Mais depuis que les kits solaires sont venus dans notre zone et que je m’en suis procuré, j’ai la lumière et je regarde les informations comme si j’étais dans une ville. Donc, j’utilise aisément l’énergie comme tous ceux qui sont dans les grandes villes », se réjouit-il.
Champ solaire photovoltaïque de Kpokissa
Dans le camp des acteurs du système éducatif, la satisfaction est également totale. Le directeur de l’école primaire publique de Kpokissa centre confie : « avec l’effectivité de l’électrification du village, par le système solaire, c’est un ouf de soulagement que nous poussons. Nos élèves pourront désormais étudier la nuit ».
L’intérêt que portent les populations villageoises à l’énergie est réel. Gratien Codjo, ingénieur en énergie renouvelable, explique comment les populations adhèrent aux projets d’installation des centrales solaires. « Lorsque nous avons lancé l’abonnement au réseau à Kpokissa, nous avons connu une grande mobilisation au sein de la population. C’est pareil dans beaucoup d’autres localités. Ce qui est intéressant, si vous allez dans ces localités aujourd’hui, vous allez constater une nette amélioration des habitudes. L’animation de petits marchés du soir, l’ouverture des centres de saisie et photocopie, des buvettes par-ci par-là. Bref, c’est une révolution », souligne le Directeur de l’entreprise ESEEB, spécialisée dans le solaire photovoltaïque.
Des entraves à la révolution
Le Bénin n’étant pas autosuffisant en énergie électrique, a opté depuis des décennies pour son importation afin de combler le déficit. Selon les statistiques, le pays produisait jusqu’en 2001 à peine 5% de la consommation intérieure. Au fil des années, cette situation s’est améliorée avec la location de groupes électrogènes et l’extension de quelques centrales dont Maria-Gléta. Néanmoins, environ 90% de l’énergie électrique consommée reste toujours importée des pays voisins à savoir le Nigéria, le Ghana et la Côte d’Ivoire. L’instabilité de la fourniture de l’énergie électrique provenant du Nigéria, ne permet pas de régler convenablement le déficit puisque les 200 mégawatts que fournit ce pays au Béni
Pose de compteur électrique dans une brigade dans la commune de Savè
L’option de mise en place de la centrale de Maria-Gléta avec une estimation de 80 mégawatts grâce aux turbines devrait pallier cette situation d’instabilité énergétique entraînant de façon subséquente la réduction des délestages.
Au total, selon Geres-Bénin, 29% seulement de la population nationale voit ses besoins en énergie électrique couverts par le réseau actuel, et pis, le pays dépend essentiellement des énergies fossiles.
Une précarité énergétique qui est un frein important au développement économique du territoire et notamment à la valorisation de la production agricole.
Pour remédier à cette situation qui perdure, le gouvernement de Boni Yayi a opté pour la promotion des énergies renouvelables. Avec le concours du Programme régional de développement des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique (PRODERE), le Bénin a remplacé les lampadaires conventionnels existants sur les artères des villes de Cotonou, Porto-Novo et d’Abomey-Calavi, avec 1.403 luminaires plus économiques. Un raccordement de plus 15.000 lampadaires solaires et 105 micros-centrales solaires ont été installés afin de régler le déficit énergétique dans les zones rurales non couvertes par le réseau électrique. Le projet commun du millénaire de Bonou dans la vallée de l’Ouémé a permis l’installation d’une plateforme multifonctionnelle, fruit d’un partenariat stratégique entre le Bénin et le Japon avec le soutien du PNUD. A ce propos, le ministre d’État chargé du plan et du développement Abdoulaye Bio Tchané déclare : « cette plateforme est l’un des exemples de l’approche des ODD. Elle impacte la scolarisation et la lutte contre la faim. On enregistre au moins 100 emplois directs et 300 emplois indirects. Cette plateforme n’est qu’un début et nous devons continuer à multiplier dans d’autres communes afin d’en réaliser dans toutes les 77 communes. Ces expériences constituent des solutions sans doute contre la pauvreté>>.
Le nouveau départ de l’énergie
Parallèlement au développement du réseau conventionnel, le Gouvernement envisage le développement des énergies renouvelables. Gratien Codjo pense que : « Si le gouvernement peut véritablement opter pour la promotion des énergies renouvelables, plusieurs villages sinon toutes les localités du Bénin pourront être électrifiés puisque nous disposons gratuitement et abondamment de l’éclairage solaire ».
Selon le rapport présenté par le ministre béninois de l’énergie, Jean Claude Houssou, sur la situation énergétique du pays, des solutions partielles sont en cours. « Dans le cadre du projet pour la valorisation des énergies solaires, la ville d’Abomey va bénéficier de la dotation de 150 lampadaires solaires pour son éclairage. Dans le cadre de ce même projet, la commune de Zangnanado aura 100 lampadaires solaires et un micro-central de 50 kilowatts à construire à moyen et à long termes », a-t-il précisé. Félix Ebo, ingénieur en électrotechnique, administrateur général du Groupement ASEMI SA confirme que « nous avons du soleil à vendre et nous Africains, devrions montrer à travers ce système que nous sommes capables de nous prendre en charge en terme de fourniture électrique ». Autant d’aspects qui démontrent qu’avec l’énergie solaire, on pourrait totalement sortir les populations de l’obscurité.
Giscard AMOUSSOU
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