samedi, 20 avril 2024 -

1512 visiteurs en ce moment

Actualité

Le bàtonnier Jacques Migan se prononce sur le retrait du droit de grève




Le débat actuel sur le retrait du droit de grève à certaines corporations ne laisse personne indifférent. Ténor du barreau béninois et ancien bâtonnier, Jacques Migan, donne son avis sur la question dans cet entretien.

Journal : On observe, depuis quelques jours, une polémique au sein de l’opinion publique et de la classe syndicale, suite au vote par le Parlement d’une loi interdisant la grève à certains agents de l’Etat. Quelle lecture faites-vous de cette situation ?

Jacques Migan : Je vous remercie pour l’occasion que vous me donnez d’opiner sur cette actualité. Je tiens tout d’abord à présenter mes meilleurs vœux à tous vos lecteurs. Pour revenir à votre question, je tiens à rappeler que la grève est une cessation concertée et collective du travail en vue d’appuyer des revendications professionnelles et d’assurer la défense des intérêts matériels et moraux des travailleurs. Comme telle, la grève constitue un moyen essentiel permettant aux travailleurs et à leurs organisations de défendre leurs intérêts. Au Bénin, la grève trouve son fondement dans l’article 31 de la Constitution qui prévoit que « l’Etat reconnaît et garantit le droit de grève … Le droit de grève s’exerce dans les conditions définies par la loi ». Le dernier alinéa de l’article 31 de la Constitution suggère que la grève constitue certes un droit fondamental, mais que son aménagement ainsi que les modalités de son exercice sont de la compétence du législateur (voir par ailleurs article 98-21 de la Constitution).Et c’est dans la logique de l’aménagement du droit de grève que le législateur a voté la loi n° 2001-09 du 21 juin 2002 portant exercice du droit de grève en République du Benin. Cette loi énonce en son article 2 que « Les dispositions de la présente loi s’appliquent aux personnels civils de l’Etat et des collectivités territoriales ainsi qu’aux personnels des établissements publics, semi-publics ou privés à l’exception des agents à qui la loi interdit expressément l’exercice du droit de grève ». On peut déjà considérer, à la lumière de cette disposition, que la limitation, la restriction ainsi que la suppression constituent une modalité de l’encadrement du droit de grève que la Constitution a conféré au législateur. C’est sur cette base que le législateur a jugé opportun de retirer le droit de grève au corps des douaniers. C’est sur le même fondement que le législateur a retiré le droit de grève aux magistrats, aux agents de police et aux agents de santé.

Justement, est- ce que ce n’est pas maladroit de la part du gouvernement de retirer le droit de grève aux magistrats, partie intégrante du pouvoir judiciaire ?

Je voudrais d’une part, vous préciser qu’il s’agit d’une proposition de loi et non d’un projet de loi, c’est-à-dire que ce sont les députés et non le gouvernement qui ont pris l’initiative de cette loi. D’autre part, comme vous l’avez rappelé, le pouvoir judiciaire constitue le 3ème pouvoir et en tant que tel, il est le 3èmepilier de l’Etat après le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. Le pouvoir judiciaire occupe une position stratégique (voir article 17 de la loi précitée). Une interruption généralisée et prolongée du travail par les magistrats n’est pas admissible pour assurer la continuité du service public. Une telle lecture est d’ailleurs confirmée par la décision Dcc 11-065 du 30 septembre 2011 interdisant l’exercice du droit de grève aux douaniers. Conformément à cette décision, à moins d’un revirement jurisprudentiel exceptionnel, la Cour constitutionnelle devrait déclarer conformes à la Constitution du 11 décembre 1990,les dispositions de l’article 50 de la loi modifiant et complétant la loi n° 2015-18 du 13 juillet 2017 portant statut général de la Fonction publique adoptée par l’Assemblée Nationale, le jeudi 28 décembre 2017 et qui retire le droit de grève à certains fonctionnaires de l’Etat dont ceux des secteurs de la Santé, de la Police républicaine, du personnel judiciaire et autres. Elle devrait valider aussi les dispositions de l’article 20 de la nouvelle loi portant statut de la magistrature adopté par le Parlement et qui interdit dorénavant la grève aux magistrats. Le juge constitutionnel devrait entériner ces deux dispositions pour rester en phase avec sa décision Dcc 11-065 du 30 septembre 2011 qu’il a rendue antérieurement pour confirmer le retrait du droit de grève aux militaires, douaniers, policiers et forestiers consacré par la loi n° 2011-25 portant règles générales applicables aux personnels militaires, des forces de sécurité publique et assimilés, adopté par le Parlement le 26 septembre 2011.La logique défendue par la haute juridiction est que la liberté syndicale permet au travailleur de défendre ses intérêts professionnels. Et le droit de grève constitue son moyen ultime dans l’exercice de ses droits syndicaux. Cependant, le droit de grève n’est pas intangible, bien que fondamental et consacré par l’article 31 de la Constitution dont le principe à valeur constitutionnelle. Mais ce principe a des limites et habilite le législateur à « tracer lesdites limites en opérant la conciliation nécessaire entre la défense des intérêts professionnels, dont la grève est un moyen, et la préservation de l’intérêt général auquel la grève est de nature à porter atteinte ». Et en ce qui concerne les services publics, la reconnaissance du droit de grève par le constituant ne saurait avoir pour effet de faire obstacle au pouvoir du législateur d’apporter à ce droit les limitations nécessaires en vue d’assurer la continuité du service public, qui, tout comme le droit de grève, a le caractère d’un principe à valeur constitutionnelle, analyse le juge constitutionnel. Partant donc de ce principe à valeur constitutionnelle, la haute juridiction trouve que les limitations apportées au droit de grève peuvent aller jusqu’à son interdiction aux agents dont la présence est indispensable pour assurer le fonctionnement des services dont l’interruption porterait atteinte aux besoins essentiels du pays.

Quelle lecture faites-vous alors de la réquisition du Garde des Sceaux ?

Je pense que la réquisition prise par le ministre de la Justice est légale. On peut procéder à la réquisition des fonctionnaires qui exercent une fonction d’autorité, une fonction stratégique (article 17 de la loi sur l’exercice du droit de grève) au nom de l’Etat et dans les services essentiels. Et vous conviendrez avec moi que dans un Etat de droit, la justice est un service stratégique dont l’interruption prolongée et sans service minimum créerait un danger pour la société.

Alors comment voyez-vous le dénouement de cette crise  ?

Je ne parlerai pas pour ma part de crise. Les députés ont voté une nouvelle loi conformément aux prérogatives que leur reconnaît la Constitution. On attend juste le contrôle de conformité de la loi par la Cour Constitutionnelle. Dès que la Cour qui comprend des membres (le Professeur Holo, la magistrate Afouda Gbèha…) qui ont cosigné la décision de 2011 suscitée, se conformera à sa propre jurisprudence et validera les lois votées, toute grève dans le secteur de la santé ou de la justice sera alors illégale et l’on pourra appliquer des sanctions appropriées aux contrevenants.

Propos recueillis par AT

www.24haubenin.bj ; L'information en temps réel

15 janvier 2018 par Judicaël ZOHOUN




Tioleja Films engagée dans la narration de l’histoire africaine


21 février 2024 par Akpédjé Ayosso
Yasmina Fagbemi Edwards, co-fondatrice de la société de production (...)
Lire la suite

Bonaventure C. GUEDEGBE s’exprime sur le retrait de la Cedeao du (...)


2 février 2024 par Judicaël ZOHOUN
Le dimanche 28 janvier 2024, le Burkina Faso, le Niger et le Mali ont (...)
Lire la suite

Les attentes de la 5e édition du séminaire sur la justice commerciale


24 novembre 2023 par Akpédjé Ayosso
Le Conseil des Investisseurs Privés au Bénin (CIPB) en partenariat (...)
Lire la suite

« Notre objectif est de faire en sorte que nos clients se sentent (...)


21 septembre 2023 par La Rédaction
A la tête de MTN Bénin depuis 2020, la Directrice Générale du premier (...)
Lire la suite

’’Ce G20 reflète la voix des pays du Sud’’ (Premier ministre Narendra Modi)


8 septembre 2023 par Akpédjé Ayosso
La présidence indienne du G20 marque un moment décisif car le pays (...)
Lire la suite

« Avoir refoulé l’He Malèhossou ne veut pas forcément dire qu’Olivier (...)


10 juillet 2023 par Judicaël ZOHOUN
|Une interview-analyse du Journaliste, Vianney ASSANI, Editorialiste (...)
Lire la suite

A cœur ouvert avec le Chef de mission SDSN en visite au Bénin


27 février 2023 par Judicaël ZOHOUN
Mme Eve de la Mothe Karoubi, Cheffe des réseaux, Directrice du (...)
Lire la suite

L’ANSSFD fait le point après l’interdiction de la collecte d’épargne (...)


2 décembre 2022 par Judicaël ZOHOUN
L’Agence Nationale de Surveillance des Systèmes Financiers (...)
Lire la suite

« Il faut compter sur ASO Baobab pour la prochaine Ligue Nationale (...)


26 octobre 2022 par Judicaël ZOHOUN
Imelda WADAGNI rêve grand ! Au terme d’une assemblée générale (...)
Lire la suite

« Si on a cinq présidents comme Talon en Afrique, le continent va (...)


19 mai 2022 par Judicaël ZOHOUN
Monsieur Bunmi Jinadu est un promoteur très influent dans le (...)
Lire la suite

A Cœur Ouvert avec Roland GANFLE, chef section embouteillage


13 mai 2022 par Judicaël ZOHOUN
Découvrez chaque mois, un métier de la brasserie en immersion avec un (...)
Lire la suite

Q&R : Les leçons du dernier congrès mondial de la nature


18 janvier 2022 par Judicaël ZOHOUN
Lecture rapide L’innovation de ce congrès aura été d’avoir sur le (...)
Lire la suite

« Nous voulons faire d’Athiémé le pôle touristique le plus fréquenté (...)


26 juillet 2021 par Judicaël ZOHOUN
Ville historique à fortes potentialités touristiques, Athiémé se veut (...)
Lire la suite

« Nous saluons l’action du gouvernement à répandre ce projet dans (...)


20 juin 2021 par Ignace B. Fanou
Le Directeur du Centre d’excellence régional contre la faim et la (...)
Lire la suite

Ce qu’il faut savoir des accidents scolaires


15 mars 2021 par Boniface CAKPO
Plusieurs situations créent des accidents dans les écoles. Des murs (...)
Lire la suite

Le groupe Teriba s’engage pour les sans espoir


16 novembre 2020 par Ignace B. Fanou
Quatre (04) artistes-musiciens et groupes musicaux du Bénin (Teriba, (...)
Lire la suite

« Boni Yayi ne peut pas dire qu’il ne nous doit pas des arriérés »


19 octobre 2020 par Judicaël ZOHOUN
Invité sur les antennes de URBAN FM ce 19 octobre 2020, *Paul Essè (...)
Lire la suite

Les clarifications de Romuald Wadagni sur les arriérés de salaire


19 octobre 2020 par Judicaël ZOHOUN
A la suite de la rencontre entre le Chef de l’Etat et les (...)
Lire la suite




Derniers articles



Autres vidéos





Les plus populaires