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Le codificateur des textes de l’éducation au Bénin a prévu que tout candidat admissible à un examen subisse des épreuves orale et sportive afin que son admissibilité soit confirmée ou infirmée selon qu’il ait réagi positivement ou négativement auxdites épreuves. Seulement, vu le mode de déroulement de ces épreuves, on est en droit de se demander si ces exercices sont vraiment nécessaires ?
Les conditions dans lesquelles les épreuves orales se déroulent donnent de la matière à réfléchir. Le constat est amer. Dans les centres où doivent se dérouler ces activités, les consignes sont très fermes. Chaque année, le discours des autorités en charge de l’éducation à travers notamment les présidents de jury ou les chefs de centre de composition, est le même. ‘’ Nous avons déjà un taux faible d’admissibilité. Il n’est pas opportun que nous allions en deçà de ce taux. Alors les notes que vous attribuerez doivent rester dans la fourchette de 15-18 ‘’, a recommandé un chef centre aux interrogateurs en Anglais mis sous ses ordres dans dans le département du Mono.
Cette année, le folklore a été encore organisé. La consigne dans ce département est que aucun candidat ne doit pas avoir moins de 15/20 en Anglais, pourvu qu’il soit présent.
Les mêmes consignes sont intimées en EPS. Du coup, au fil des années, les élèves s’intéressent de moins en moins à ces disciplines car ils savent que quel que soit leur niveau, ils réussiront à avoir une très bonne note à l’oral.
Les candidats eux-mêmes sont conscients de ce fait. Un parmi eux a eu le culot de confier : ‘’Je sais que ceci n’est qu’une formalité. Car l’année passée, mon grand-frère qui avait un niveau très bas en Anglais a eu 18/20 et 16/20 en EPS. Alors j’ai conclu que même si je ne dis rien, je ne vais plus échouer.’’ Cette déclaration de ce candidat est certainement déjà répandue dans l’opinion populaire. Et personne ne s’attend plus à un échec une fois les résultats provisoires proclamés.
Si la déclaration de cet élève met hors d’eux-mêmes les professeurs d’Anglais qui sont nombreux à participer impuissants à cette mascarade, elle vient également poser sur tapis un problème sérieux : les épreuves orales sont-elles vraiment nécessaires ?
Epreuves orales et sportives : une farce à supprimer ?
A la question de savoir si ces épreuves sont opportunes, on est tenter de répondre par la négative sans risque de se leurrer. Car puisqu’on connaît déjà les résultats à l’avance, à quoi bon de déranger encore les candidats avec ces genres de farce ?
Il urge donc que des réformes profondes soient opérées dans ce secteur. Mais au-delà de toutes autres considérations, la passivité ou la complicité des professeurs d’Anglais et d’EPS sont aussi à dénoncer. Quelle valeur donnent-ils eux-mêmes à leurs matières en acceptant de participer à ce jeu qui n’honore guère le système éducatif national ? Attribuer une note de 15/20 à un élève qui n’est pas en mesure de prononcer "Good morning’’ ou encore de faire ‘’0,50 mètre’’ en saut en hauteur est tout simplement déplorable. Nombreux sont ces enseignants qui s’indignent de la manière dont les choses se passent sans pour autant agir. Mais comme on le dit, « on crache dans le plat qu’on mange ». Du moment où leur participation à cette facétie leur procurera des billets de banque dans les poches, ils se foutent pas mal de ce que les autorités leur imposent. ‘’C’est terrible ce que nous subissons en administrant ces épreuves. Des apprenants qui te narguent à la limite car sachant que tu ne peux rien contre lui ou lui donner une mauvaise note. Tu lui poses de questions et il refuse de répondre, tu le laisses partir et tu mets 15 sur 20 devant son nom. Je vous assure, c’est une humiliation pour nous mais nous ne pouvons rien car les consignes viennent souvent du haut’’, a déclaré impuissant un examinateur qui a requis l’anonymat. Il importe que des mesures correctives soient envisagées pour rectifier le tir ou tout simplement surseoir à ces épreuves dites orales. Et cela renflouerait à coup sûr les caisses de l’Etat. Les centaines de millions de francs CFA débloquées chaque année pour organiser cette dramatique comédie serviront à faire développer le pays dans d’autres domaines plus sensibles, ou répondre à d’autres urgences du secteur éducatif. Car cela ne rime à rien l’organisation de ces épreuves, une forme de tricherie masquée organisée par les autorités elles-mêmes. Il faudrait alors qu’on oriente autrement les épreuves orales à défaut de les supprimer.
Que faire ?
On donnerait, à ne point en douter, une autre signification et beaucoup plus de crédibilité aux épreuves orales si elles sont organisées avant même la phase des épreuves écrites aux divers examens. Même dans ces conditions, les résultats doivent être connus par les candidats afin qu’ils prennent les dispositions idoines pour affronter les épreuves écrites. À l’ère de Rupture où le maître mot est la rationalisation des ressources financières, il faut absolument qu’on arrête de faire saigner les caisses de l’Etat pour organiser des épreuves dont les résultats sont connus d’avance par tout le monde.
Il est vraiment indéniable que l’on donne de la contenance aux épreuves orales. Elles ne doivent pas être considérées comme une simple formalité. Et cette bataille doit être menée par les professeurs qui enseignent les différentes matières retenues à l’oral. Et ça, les professeurs d’EPS l’ont déjà compris et peu à peu s’extirpent de ce faux jeu en attribuant aux candidats leurs réelles notes, surtout au BAC. Les autres enseignants doivent leur emboîter le pas pour qu’on ne plonge pas davantage les candidats dans cette facilité.
Cokou Romain COKOU
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