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Tantie Béa est une belle femme de 35 ans qui donne des idées aux jeunes hommes. Plantureuse, la démarche provocante, elle vient de Djrèbé, un arrondissement situé à proximité de Porto-Novo.
(Par Edson Adé)
Son mari Félix S., chauffeur de son état, avait l’habitude d’aller dans cet arrondissement. C’est ainsi qu’il remarqua Tantie Béa, alors jeune pousse qui, selon les prévisions de l’homme, devait devenir une femme très convoitée et correspondant à ses aspirations libidinales. Il était un grand connaisseur de femmes car Tantie Béa devint effectivement telle qu’il l’avait prévu. Après une armada de cadeaux, il réussit à obtenir sa main et l’amena dans sa maison à Godomey. Tantie Béa, qui n’avait pu accéder à l’école, avait cependant promis de ne jamais se laisser désespérer par cette situation d’analphabète. Elle arborait en effet une mine et des atours que ne désavouaient pas les plus lettrées. Bientôt, elle eut une fille appelée Bijoue. C’est au cours du baptême de celle-ci qu’elle entra de plein pied dans un groupe de femmes de Godomey.
Son physique de déesse, ainsi que les habits qu’elle portait reconstituaient des atouts. Bien accueillie dans le groupe, on l’avait surnommée Tantie. Cette appellation a été pour elle une fierté à tel point qu’elle décida de ne pas faire un deuxième enfant dans l’immédiat. Son mari, fou d’elle, ne remarqua point le changement qu’elle subissait. Tantie Béa, consciente de son sex-appeal, se plaça au devant de tous les événements de la ville. Ses copines n’eurent aucun scrupule à la pousser dans les bras des hommes d’affaires les plus riches. Elle tirait profit de ses bonnes relations et, à chaque fête de l’association, elle distribuait de l’argent. Tout cela pour se faire un nom. Le temps passa. Tantie s’était toujours arrangée à cacher son nouveau comportement de prostituée de luxe à son mari. Parce qu’elle le savait capable de lui faire du mal s’il l’apprenait.
Dans ses moments de colère, il lui disait toujours qu’elle était son unique bien et qu’il préférait mourir que de la perdre. Tout aurait pu se limiter aux petites aventures avec les commerçants de la place si Roland, un jeune homme à qui l’aventure en France avait réussi, n’avait pas jeté son dévolu sur Tantie. L’harmonie de son corps le faisait fantasmer. Il en avait des cauchemars ! Il alla, pour se rapprocher de la reine de son cœur, jusqu’à louer la maison voisine de celle Tantie Béa. Et pour avoir un petit allié dans l’entourage de Tantie, il comblait de cadeaux Bijoue, l’unique fillette de 5 ans de Tantie Béa. Etonnée de ces cadeaux incessants à sa fille, Tantie partit un jour dans la maison voisine pour remercier le fameux "tonton" dont sa fille ne cessait de lui parler. C’est justement ce que Roland attendait pour parler de la disparition de sa propre fille qui aurait le même âge que Bijoue. Il réussit à apitoyer la jeune dame sur son sort au point qu’elle tomba dans ses bras.
D’autant plus facilement que Roland avait de l’allure, du discours et, bien entendu, des espèces sonnantes et trébuchantes ! Cette passion nouvelle fit oublier à la Tantie toutes les précautions qu’elle avait l’habitude de prendre. Félix, comme tout bon cocu, ne comprenait pas ce qui se passait devant ses yeux. Un après-midi, il devait aller à Bohicon. Il prévint sa femme, mais jusqu’à 22 Heures, son véhicule était en panne. C’est ainsi que Félix céda ses passagers à un autre transporteur et retourna à la maison où il trouva sa chambre vide. Sa fille Bijoue dormait seule dans son lit.
Le choc fut tellement rude qu’il s’assit à même le sol. Brusquement, il réveilla sa fille et lui demanda où était sa mère, vu qu’il était minuit et que les autres co-locataires dormaient. Innocemment. L’enfant lui dit : "Elle est chez tonton comme d’habitude et viendra dans peu de temps. Elle m’apportera des cadeaux. Tonton est très gentil. C’est moi qui l’ai amené un jour et depuis, Maman s’en va là-bas chaque fois que tu n’es pas là !". L’enfant, ignorant l’effet que ses paroles faisaient sur son père, contait son récit ; le père ne faisait rien pour l’interrompre. Abattu par la révélation, Félix prit machinalement son coupe-coupe et dit à sa fille de le conduire chez son fameux "tonton".
L’enfant, voyant l’état de son père et le coupe-coupe qu’il avait dans la main, lui demanda en pleurant de ne pas faire de mal à sa mère, ce qui énerva davantage le pauvre chauffeur. Il pénétra dans la maison de Roland et trouva sa chambre à-moitié ouverte. La petite fille cria à sa mère dormant à côté de Roland que son père était là avec un coupe-coupe. A ces mots, Roland se réveilla brusquement et se saisit lui aussi de son coupe-coupe. Se menaçant les armes à la main, les deux rivaux se fixèrent longtemps devant la fillette qui larmoyait. Roland finit par dire au chauffeur de rentrer avec sa femme et son enfant car il pouvait le mettre en morceau comme un cabri. Félix ramena sa famille chez lui. Le lendemain matin, les gens furent étonnés de voir Tantie Béa faire ses bagages pour rejoindre ses parents. Sans pouvoir expliquer pourquoi elle partait. Une bien triste histoire…
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