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La crise qui secoue le Bénin ne laisse personne indifférente. Convié autour d’une table ronde pour situer les responsabilité, chaque invité s’est, de part ses arguments, campé sur sa position tout en jetant le tort sur les deux camps qui se refusent de s’écouter
« Le syndicalisme béninois est devenu un espace où on s’exprime librement et sur la gouvernance du pays. C’est un syndicalisme qui a deux visages », estime Huguette Bokpè Gnacadja, acteur de la société civile. Elle soutient que l’histoire nous renseigne que le syndicalisme est resté le même depuis des années au Bénin. Il y a comme un glissement des revendications syndicales vers une crise énorme qui chaque fois se radicalise. Noël Chadaré pense que le syndicat défend les intérêts des travailleurs. Il ajoute que s’il s’agit des questions qui créent un problème et touche l’intérêt de tous, nous défendons. Parlant de grèves politiques dont estiment certains acteurs, il se demande s’il y a des indications politiques sur leur plateforme revendicative. « C’est une fuite en avant. Ils parlent de grève politique pour montrer aux populations qu’il y a des mains invisibles derrière. Nous ne sommes pas des pantins pour être à la solde des politiques », avoue-t-il. Le député Orden Aladatin affirme que « par le passé j’en ai appelé à des grèves politiques que malheureusement je n’ai pas eues ». La grève politique est selon lui, celle que vous engagez à des fins politiques. « Je n’en ai pas encore eues », confie-t-il. Tous pensent qu’il peut y avoir des moments de pression pour exiger quelque chose au gouvernant. Il dénonce par ailleurs les accointances coupables avec le milieu politique. Selon l’honorable Nourémi Atchadé, il faut faire une démarcation entre les actions syndicales et celles politiques. Les syndicats défendent dit-il, les intérêts des travailleurs et des populations. Ils défendent la liberté si elle est menacée. « Il y a des syndicalistes qui marchent avec des politiques pour défendre des libertés. Et cela se passe partout. Ce n’est pas pour autant qu’il faut parler de grève politique », rétorque M. Atchadé. Quant à Vincent Ehoulé, ancien syndicaliste du secteur de la santé, il se demande comment arriver à éviter le piège politique des manipulations ? « Tout le monde sait que lorsque vous êtes en situation de conflit avec le gouvernement, le fait que l’opposition tente de vous emballer est très fort ». Noël Chadaré ne partageant pas toujours cette image collée au syndicalisme pense que « quand on mène un combat, on la mène avec conviction. Nous avons mené un combat de mercredi rouge mais il n’y a pas été question de vénalité. On n’est pas que dans un syndicalisme de revendications mais nous optons aussi pour un syndicalisme de développement ». Il déplore qu’on n’anticipe pas sur la crise au Bénin. On laisse les choses s’empirer et on appelle à la négociation mais il n’y a pas de vérité qui jaillit en fin de compte.
La colère
« Ce sont les députés qui ont allumé le feu en voulant introduire une loi liberticide dans les dispositions », martèle Noël Chadaré. Il ajoute que les négociations avec le gouvernement sont assorties de plusieurs conclusions. L’échec des négociations selon lui est imputable au gouvernement. Pour Huguette Bokpè Gnacadja, « au regard de la loi, la légalité c’est des revendications à caractère professionnel. Le contrat de travail est un contrat synallagmatique. Tu travailles je te paie et si tu ne travailles pas je ne repaie pas. Si les syndicalistes disent que l’État ne doit pas décider de l’illégalité de la grève, le syndicaliste aussi ne doit pas se radicaliser sans que le juge ne tranche ». Elle souhaite que les syndicalistes reprennent le travail en attendant de réclamer la rétrocession des défalcations sur salaire. « Ce n’est pas bien de faire de la rétrocession un nouveau motif de grève », estime-t-elle. Néanmoins, elle dira que si le gouvernement a procédé aux défalcations en pensant que c’est une sanction, il a tort. C’est la responsabilité des deux qui est en cause ». Mais selon Nouremi Atchadé, c’est le gouvernement qui est d’abord en erreur parce qu’il n’a pas respecté la charte du dialogue social. Quant à Orden Aladatin « la défalcation n’est pas liée au caractère licite ou non. Quand vous travaillez, c’est que vous attendez un salaire, mais si vous ne travaillez pas vous devez vous attendre à la défalcation ».
Sortie de crise
« On a le sentiment que ceux qui viennent discuter n’ont pas une autonomie de décision », déplore Chadaré. Me Huguette Bokpè Gnacadja appelle à ce que chacun revoit sa position. A l’entendre, « ce que prescrit la loi, c’est de négocier et établir un PV. « Je ne sais pas pourquoi on fait les choses à l’envers. Je ne comprends pas pourquoi s’il y a problème on va d’abord vers la grève avant de négocier. Tout se passe comme s’il n’y a pas de charte », se demande-t-elle. Elle pense que les organes de médiation ont échoué dans leur rôle. Revenant sur les questions d’accointance, Orden Aladatin, estime que si pour des questions de liberté une force politique se retrouve à côté des politiques, il n’y a aucun problème. Mais aussi on ne verra pas des politiques à côté des syndicalistes pour des revendications corporatistes. Il ne partage pas la manière dont la grève se mène au Bénin. « Aujourd’hui c’est une question de forme qui se pose. Le gouvernement a t-il le droit de défalquer ? Moi je dit oui dans une certaine mesure », a-t-il avoué. Ce que ne partage pas l’honorable Nouremi Atchadé que estime que parmi les solutions, il faut rétrocéder les sous pour décrisper la situation. Statuant sur la crise de 2012 sous le gouvernement Yayi, il affirme que quand ça compliquait, le gouvernement a été obligé de rétrocéder. « Le jusqu’au-boutisme ne nous amène nulle part. Le déclenchement de la grève actuelle fait partie de l’attitude du gouvernement à voter la loi sur le retrait de grève. Ce n’est pas tout ce que la loi a permis qu’il faut faire. Ce que nous devons faire est de trouver la solution pour sortir de la crise », conseille-t-il. Vincent Ehoulé ne dira pas la même chose puisqu’il confie qu’il y a une confusion de rôle entre le syndicalisme et les politiques. « Aucune défalcation dans le secteur de la santé n’a été restituée. Il faut que le syndicalisme se démarque de sa position d’avec les politiques », soutient-il.
G. A.
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