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Depuis deux ans, le nombre de suicides ne cesse d’augmenter dans les prisons béninoises. On en connaît les causes et les remèdes. Ne manquent que les moyens.
Adé Edson
Le Bénin ne parvient pas à enrayer l’épidémie de suicides qui sévit dans ses prisons depuis cinq ans. Après une année 2007 où l’on avait dénombré 13 suicides, un chiffre record , 2008 ne s’annonce guère mieux : au 9 décembre, 9 détenus s’étaient donné la mort dans les prisons béninoises. Malgré un rapport de l’administration pénitentiaire, une circulaire ministérielle, plusieurs études et un plan d’urgence lancé dans les établissements, rien ne semble pouvoir inverser cette tragique progression.
Les données ne manquent pourtant pas sur les détenus qui se suicident en prison. Profil type : il s’agit d’un prévenu (qui attend d’être jugé et n’a donc pas encore été condamné), non croyant, plutôt d’un niveau social élevé et soumis à une procédure criminelle. C’est ce qui ressort d’une étude minutieusement menée par le ministère en charge de la Justice. Si l’infraction a été commise sur un proche, le risque augmente considérablement. Compte tenu des règles de sécurité, la technique utilisée est à 95% la pendaison ou la strangulation. En 2007, on a également relevé, entre autres, 6 suicides par mutilation, 5 par produits médicamenteux, 2 par précipitation dans le vide. On sait aussi avec précision quels sont les moments où le risque est le plus grand.
Les quinze premiers jours derrière les barreaux sont les plus meurtriers. Le chiffre reste élevé les premiers mois. Conséquence logique de ce phénomène : ce sont majoritairement des prévenus qui se donnent la mort. Ce sont les quarante-huit premières heures derrière les barreaux qui sont les plus terribles à supporter. Le Rapport sur la prévention du suicide en milieu pénitentiaire, commandé par le ministère de la Justice, pointe les causes de ce pic : garde à vue éprouvante, passage par le dépôt, où le futur détenu entend souvent les pires descriptions de la réalité carcérale, fouilles, privation des papiers d’identité et de tout bien personnel et, enfin, arrivée dans une cellule où se trouvent déjà souvent d’autres détenus. Outre l’incarcération, d’autres moments sont également propices aux suicides : les mois de juin et de décembre (en particulier la veille de Noël et du nouvel an), les débuts de week-end (le jour le plus meurtrier est le samedi), les jours qui précèdent un procès (voire une libération). Le risque augmente encore si le détenu fraîchement arrivé est plutôt aisé.
De manière générale, d’ailleurs, plus le statut social est élevé, plus le risque de suicide est important. Et, contrairement à ce qui se passe à l’extérieur des murs, les suicides nocturnes sont très fréquents. Le placement en quartier disciplinaire - le fameux mitard - fait exploser le taux de suicides : il est sept fois plus important que pour le reste de la prison.
Forte de ces données précises et inquiétantes, l’administration pénitentiaire a timidement tenté de proposer quelques mesures, appliquées dans les établissements depuis le début de l’année : meilleur accueil des arrivants (douche, vêtements propres), suivi individualisé des sujets présentant des risques suicidaires, « humanisation » des quartiers disciplinaires. Mais ces mesures de bon sens se heurtent toujours à un manque criant de crédits : ainsi, l’absence d’interphones à l’intérieur des cellules, dont leur présence devrait en général d’une grande utilité...
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