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Ainsi donc, le président béninois, qui conseillait il y a quelques jours à ses compatriotes de se « méfier de la démocratie, qui est un poison pour nos peuples » chercherait des arguments venus de France pour leur faire avaler la pilule de la révision de la constitution. La recette est immuable et ne varie pas d’un iota, d’un autocrate à un autre. Marches de soutien à grand renfort médiatique, visites d’allégeances des indéboulonnables politiciens transhumants professionnels, et puis enfin les experts internationaux.
Par Mamondé LEGBA
« Dans tous les coups bas contre le peuple africain francophone, il y a toujours un ‘’expert français’’ qui du seul fait de la légitimité supposée de sa parole d’ancêtre gaulois, vient professer la bonne nouvelle chez nous », tempêtait un internaute la semaine dernière sur les réseaux sociaux. « Le cas togolais et le tour de passepasse à la mort de Eyadema père pour l’avènement de Faure son fils avec à la manette, un constitutionaliste français, en est une parfaite illustration » commantait un autre follower.
Ils sillonnent le continent et proposent leurs services aux présidents dictateurs décidés à changer la constitution pour s’éterniser au pouvoir. Leur légitimité tient évidement de leur titre d’agrégé, et de professeur reconnus autour d’eux certes, mais elle tient avant tout et surtout du seul fait que pour convaincre un béninois rien ne vaut « un yovo » qui détient la vérité absolue. Les arguments sont d’abord fondés sur ce principe … et nos conférenciers prennent bien le soin de le mentionner et pour cause.
Au Bénin, depuis 2011, intellectuels, journalistes de la presse libre, jeunes actifs de la blogosphère, quelques hommes d’église, classe politique de l’opposition et quelques ‘’rebelles’’ proches du pouvoir se battent et sont vent debout contre le projet d’une révision opportuniste de la constitution devant permettre à Yayi Boni, l’actuel locataire de la Marina réélu par ‘’K.O’’ en 2011 dans des conditions très troubles, de s’éterniser d’une manière ou d’une autre au pouvoir. Certains, des plus exposés de ces opposants mobilisés autour du fameux slogan ‘’Touche pas ma constitution’’ seraient poursuivis, harcelés, emprisonnés pour certains pour des motifs bien connus de complot contre la sureté de l’Etat, tentative d’empoisonnement …. parce qu’ils financeraient les antirévisionnistes (cf déclarations de M. Talon sur RFI).
Et donc, ce marché juteux d’expert constitutionnaliste, voit déverser sur le continent et au Bénin en ce moment, ces apprentis sorciers qui viennent expliquer, avec une médiatisation démesurée à la zaïroise, les bienfondés d’une révision de la constitution béninoise. C’est le cas depuis quelques semaines d’un certain Bertrand Mathieu, respectable Professeur d’une grande université parisienne, qui est venu faire un show sur la révision opportuniste de la constitution au Bénin. Malheureusement, instrumentalisé ou non, monsieur Bertrand repartira avec ses émoluments (on ne vient pas au Bénin prêcher cette bonne nouvelle rien que par amour de la discipline) mais restera loin de toutes les déconvenues qui suivront son expérience de pyromane au Bénin….
Dans sa biographie, le sieur Bertrand a mentionné les missions et autres conférences qu’il a effectuées à l’étranger : Chine, Turquie, Iran, Grèce, et pour la patte enfarinée, le Canada … C’est dire que les références à l’étranger du professeur en terme de démocratie ne forcent pas toutes l’admiration. Qu’à cela ne tienne, il peut rajouter à cette liste très très démocratique pour certains, le Bénin, qui cherche surement la recette pour un régime politique à l’Iranienne.
La deuxième vague d’experts qui déferlera d’ici peu sur Cotonou aura pour mission, d’expliquer que cette révision de la constitution a entrainé une nouvelle République et donc devra permettre à l’ancien-nouveau président de se représenter aux élections présidentielles les dix prochaines années … quand bien même les articles 42 et 44 de la Constitution limiteraient à deux, le mandat d’un président élu.
La troisième alternative de Yayi serait enfin, la prorogation de son mandat et tout cela ponctué par les argumentaires ‘’d’experts’’ juristes incendiaires.
Le cas Wade au Sénégal (mentor et ‘papa spirituel’ du président béninois comme ce dernier aime à le rappeler) donne quelques espoirs au peuple béninois qui a toujours fait preuve de maturité et sait faire bloc pour barrer la route aux aventuriers de la trempe de Yayi Boni et de ses précepteurs constitutionnalistes venus de loin … mais à beau mentir, on finit par se prendre à son propre piège et l’expérience sénégalaise est, de ce point de vue, éclairante.
Oui, la constitution béninoise est perfectible ; même si je suis de ceux qui pensent qu’il y a beaucoup de points qui sont à l’avant-garde des combats que ne mènent que maintenant le parlement Français (non cumul des mandats, limitation du nombre de mandats, quinquennat à œuvre depuis 1991, 10 ans avant la France etc.…). Mais une révision de la constitution dans les conditions de suspicion généralisée, sans consensus politique sur l’essentiel et avec avec un président qui a trahi la confiance de tout un peuple depuis 2006, est dangereuse pour le Bénin.
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