L’intervention militaire française a bouleversé les filières sahéliennes de la drogue. Mais d’autres routes pourraient déjà être ouvertes, alors que de la cocaïne continue à être expédiée d’Amérique latine vers l’Afrique de l’Ouest.
La guerre contre les islamistes armés d’Aqmi et leurs alliés, puis les mandats d’arrêt lancés contre plusieurs personnalités liées à différentes affaires de drogue dans le nord du Mali ont porté un coup aux réseaux actifs dans le Sahel. Mais des experts se demandent si les organisations criminelles n’ont pas déjà trouvé des routes alternatives dans une autre partie de ce vaste espace désertique. « La route sahélienne a été perturbée par l’intervention française. Mais les organisations criminelles sont très fortes pour se réorganiser », indique un acteur de la lutte contre les stupéfiants basé en Afrique de l’Ouest. D’autant que plusieurs trafiquant de haut vol courent toujours dans la région.
En tous cas, l’intérêt des trafiquants de drogue latino-américains pour l’Afrique de l’Ouest ne semble pas faiblir. Le 15 mars dernier, la marine espagnole a intercepté, à 700 milles au large de l’archipel du Cap Vert, un cargo en provenance du Venezuela, transportant 1,8 tonne de cocaïne. La marchandise devait, selon notre interlocuteur, être déchargée en mer sur un autre navire venu du Cap Vert.
La Guinée-Bissau encore et toujours...
En outre, toujours dans la première quinzaine du mois de mars, cette même source, nous apprend qu’un avion chargé de 600 à 800 kg de cocaïne a atterri en Guinée-Bissau. Ce type de vol aurait lieu environ une fois par mois. Des appareils en provenance d’Amérique Latine continuraient ainsi à se poser en différents endroits du pays (notamment Bafata, Gabu, Cachau) sur des pistes désaffectées, voire de simples routes, bloquées pour l’occasion par l’armée pendant la nuit et éclairées grâce à des projecteurs alimentés par des groupes électrogènes.
Notre source précise que le chef d’état-major, Antonio Indiai, et le patron de l’armée de l’air, Ibrahima Papa Camara (qui est placé sur liste noire aux Etats-Unis) jouent toujours un rôle clé dans le trafic, tandis que l’ancien « parrain » local, le patron de la marine, Bubo Na Tchuto, serait sur la touche.
« En revanche, nous ne savons pas par où repart la drogue, reconnaît l’expert anti-drogue occidental que nous avons interrogé. Les statistiques de 2012 montrent que très peu de saisies de cocaïne en provenance directe d’Afrique de l’Ouest ont été faites en Europe. Il est possible qu’une partie parte vers l’Afrique du Sud, mais la majorité va forcément vers le vieux continent ».
Dès lors, plusieurs hypothèses sont possibles. La drogue peut repartir en petite quantité via des passeurs. Sachant qu’il existe trois portes de sortie en vol direct à partir de Bissau : Dakar, Casablanca et Lisbonne. Mais il est impossible que toute la drogue reparte par ce biais. D’où l’hypothèse qu’elle sorte par conteneurs, vu que les contrôles sur le port de Bissau son quasi-inexistants. Rappelons que la détection des conteneurs suspects à l’arrivée en Europe est difficile. « Compte tenu de l’importance du trafic maritime et de la nécessité d’éviter de ralentir les transactions commerciales dans les grands ports, il n’est pas aisé de repérer les cargaisons de drogue, à moins d’avoir bénéficié de renseignements préalables à partir du lieu de départ du conteneur », explique l’expert.
Une autre hypothèse est, enfin, que la drogue soit transportée par la route via le Sénégal, remonte vers la Mauritanie, puis le Maroc, même si les contrôles sont plus importants dans ces deux pays que par le passé. Des sources occidentales indiquent, quoi qu’il en soit, que de la cocaïne pourrait être stockée en Casamance, frontalière de la Guinée-Bissau. Du fait des attaques régulières du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC), certaines zones y sont vierges de tout contrôle des forces de l’ordre.
Rfi.
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2 avril 2013 par Judicaël ZOHOUN