Si Agatha Christie devrait réécrire son célèbre roman, la Souricière, l’intrigue pourrait bien se jouer à Paris. Paris la belle, la ville lumière, la ville de toutes les envies, la ville qui a toujours inspiré les grands auteurs de ce monde. Et pour cause, il y a un acteur de fait : Patrice Talon. Au Bénin, Paris rime désormais avec Patrice. Le célèbre homme d’affaires, désormais dans le collimateur du pouvoir depuis la rocambolesque affaire de tentative d’empoisonnement, est devenu malgré lui un attrait touristique pour les hommes politiques béninois.
Avant on allait à Paris pour les études, aujourd’hui on y va pour diner. Avant, on allait à Paris pour les affaires, aujourd’hui, on y va pour se promener. Avant, on allait à Paris pour se soigner, aujourd’hui, on y va pour s’acheter une carte sim. « Air France » devrait se frotter les mains. Les affaires sont bonnes.
Yayi Boni s’inquiète des rencontres entre Patrice Talon et les députés de la République du Bénin. La « virée » de certains députés dans la capitale française courant décembre dernier, suscite encore des remous dans les arcanes du pouvoir. La refondation s’est déjà illustrée par le passé par la création sur mesure de délits. Le « délit de rencontre » qui permit au régime d’avaler d’un coup de gueule l’expert Johannes Dagnon et le commandant Pamphile Zomahoun ; le « délit de garde-robe abondante » sur lequel le régime a fondé la reconduite à domicile du juge Angelo Houssou etc. Pourtant, dans un monde ouvert, les conventions internationales garantissent la libre circulation des biens et des personnes.
Mais, il y a un grand « mais ». On connaît bien la spécialité de l’homme d’affaire Patrice Talon : le financement des élections clés en main. Ne nous voilons pas la face ; des députés français ne viendront jamais se réunir à Pobè pour préparer les prochaines élections. Pour le respect dû à ce peuple, il faut éviter un autre guet-apens. La population subit toujours les conséquences des tristes arrangements faits sur son dos depuis 2006.
Le député Épiphane Quenum, avait déclaré à la presse avec engouement « J’ai mangé avec Talon, pas seulement à l’hôtel Sofitel, Arc de Triomphe mais aussi sur les Champs-Élysées », et il s’empresse d’ajouter de manière scolaire, est-ce un crime. On a presque envie de paraphraser la déclaration d’amour du Renard dans les animaux malades de la peste : Sire Quenum, vous êtes trop bon député, vos scrupules font voir trop de délicatesse ; eh bien, manger avec Talon ; est-ce un péché ? Non, non. On connaît la chanson. En réalité, il n’y a aucune fierté à s’exhiber ainsi quand on représente les plus démunis de ce pays. C’est presque indécent de déclamer avec gloire et ferveur, les rencontres avec l’homme d’affaires. Patrice Talon n’est ni un paria, ni un Saint. Mais, il n’a qu’un seul souci, l’argent. Avec Patrice Talon, n’importe-qui peut être président.
Quant aux députés, quand on représente les populations de Covè ou de Savè, on ne va pas parler de son avenir à Bruxelles, quand on représente les populations de Parakou, on ne va pas conclure des marchés électoraux à New York. Ainsi donc, le Bénin du futur semble se dessiner en terre étrangère. Il ne serait d’ailleurs pas erroné d’affirmer que l’avenir de toute l’Afrique est dessiné depuis l’Occident. La population analphabète continuera toujours de croupir dans la misère. Quelques billets de banque au moment des joutes électorales suffiront pour leur faire valider le candidat « élu » depuis l’Occident.
A l’évidence, les députés sont plus préoccupés par leur survie politique que par les réalités du pays. Entre les intérêts économiques de bailleurs politiques et leurs carrières, les députés doivent trouver une place pour la République. Et cette place ne se trouve surement pas hors du Bénin.
Jules BONOU
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13 février 2014 par Nouvel auteur