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Esther Ngumbi
Lecture rapide
– Trois des 4 nations menacées de famine en 2017 se trouvent en Afrique
– Les Etats doivent investir dans l’approvisionnement durable en eau
– Les décideurs devraient s’inspirer de l’expérience des pays asiatiques
Les champs sont nus, sous un soleil brûlant et les températures augmentent chaque semaine. Les insectes nuisibles ont détruit toutes les cultures que les températures extrêmes n’ont pas anéanties et pour de nombreux agriculteurs, il n’y a rien à faire. [1] Les informations sur la faim en Afrique font désormais quotidiennement la une des médias. [2]
À l’échelle mondiale, la situation, à vrai dire, n’est guère plus reluisante : les indicateurs de risque de famine sont à leur point le plus culminant. [3] En fait, selon le Réseau des systèmes d’alerte précoce contre la famine, plus de 70 millions de personnes dans 45 pays auront besoin d’une aide alimentaire d’urgence en 2017 et trois des quatre pays considérés comme confrontés à un risque critique de famine se trouvent en Afrique : le Nigeria, le Soudan du Sud, le Soudan et le Yémen. [4]
“Un grand nombre de petits exploitants agricoles africains dépendent de l’agriculture pluviale et parce que les pluies de l’année dernière étaient insuffisantes, de nombreux agriculteurs n’ont pas connu de saison des moissons.”
Esther Ngumbi Université Auburn en Alabama, États Unis
Les gouvernements africains, les organisations non gouvernementales (ONG) et les organismes de secours humanitaires, y compris le Programme alimentaire mondial des Nations Unies, continuent de lancer des solutions à court terme telles que l’aide alimentaire.
Le Kenya, par exemple, distribue de l’argent et de l’aide alimentaire à ses citoyens concernés.
Le Programme alimentaire mondial des Nations Unies distribue également de la nourriture en Somalie, pays touché par la sécheresse. [5] Et en Zambie, le gouvernement recourt à une gamme variée de solutions, dont l’appel aux forces armées, pour combattre les invasions d’insectes nuisibles. [6]
Mais pourquoi en sommes-nous arrivés là ? Qu’est-il arrivé ? Pourquoi une sécheresse aussi importante ?
Les raisons de la faim chronique
Beaucoup de petits exploitants africains dépendent de l’agriculture pluviale et parce que les pluies de l’année dernière étaient insuffisantes, de nombreux agriculteurs n’ont pas connu de saison des moissons. En effet, les pluies insuffisantes dans certaines parties de la Corne de l’Afrique sont à l’origine de la sécheresse actuelle qui affecte la Somalie, le sud-est de l’Éthiopie, ainsi que le nord et l’est du Kenya. [7]
Mais même dans les pays qui n’ont pas connu de déficit pluviométrique, bon nombre des agriculteurs ont dû cultiver sur des sols appauvris et, par conséquent, les rendements étaient plus bas.
Les sols dégradés, la dépendance à l’égard de l’agriculture pluviale, ainsi que la plantation de mauvaises variétés de cultures sont quelques-uns des problèmes fondamentaux qui conduisent à de mauvaises récoltes, puis à la famine. Les aléas du climat constituent un facteur aggravant. Au vu de ces problèmes fondamentaux et basiques qui alimentent le cycle de la faim en Afrique, il est naturellement logique d’agir.
Ce n’est pas sorcier. L’agriculture va de pair avec l’eau. Il n’y a pas d’agriculture sans eau. Bien que cela semble facile à dire, il y a peu d’organisations qui s’efforcent de s’assurer que les agriculteurs et les citoyens africains ont accès à des sources d’eau permanentes. L’accès aux sources d’eau tout au long de l’année permettrait aux agriculteurs de cultiver d’une année à l’autre.
Ce que les gouvernements africains doivent faire
Les gouvernements africains doivent donc investir pour que leurs citoyens aient accès à l’eau. Les mesures susceptibles d’être mises en œuvre comprennent le forage et la réhabilitation des forages, la création de réservoirs et de systèmes d’irrigation, la construction de pompes manuelles et la mise en œuvre de systèmes de prélèvement d’eau. De telles mesures permettraient de faire en sorte que les pays continuent de faire face au problème à court et à long terme.
“Si l’Afrique veut mettre un terme aux sécheresses récurrentes, il faut prendre des décisions difficiles.”
Esther Ngumbi Université Auburn en Alabama, États Unis
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Bien sûr, il est compréhensible qu’il soit difficile de choisir des solutions à long terme, telles que de s’assurer que les citoyens aient accès à des sources d’eau permanentes tout au long de l’année, plutôt que d’investir dans des solutions à court terme, quand il y a des gens qui ont besoin d’aide dans l’immédiat.
Reconnaissant ce dilemme, Mitiku Kassa, le commissaire de l’Éthiopie pour la gestion des risques de catastrophe, aurait décrit combien il était difficile de diriger même un cinquième de son budget vers le forage de puits. [8] Mais de telles décisions doivent être prises. Le gouvernement éthiopien a dû prendre cette décision difficile en creusant des centaines de puits dans tout le pays.
Il est absolument nécessaire de faire progresser les efforts de récolte et de conservation de l’eau sur l’ensemble du continent africain.
Les gouvernements africains et les autres parties prenantes doivent accroître les investissements dans de multiples techniques de stockage de l’eau.
De telles techniques comprennent la collecte de l’eau de pluie et des inondations et la construction d’étangs de stockage d’eau et de barrages. Et pour cela, il ne devrait pas être nécessaire de réinventer la roue.
Le temps d’apprendre des autres
Les pays africains peuvent apprendre d’autres pays. Les pays du monde développé ont consolidé leur agriculture, soit en forant des puits d’eau pour s’assurer qu’ils ont accès à l’eau dont ils ont besoin pour l’agriculture, soit en investissant dans la collecte de l’eau de pluie ou de celle issue des inondations.
Aux États-Unis, en Californie, par exemple, il y a eu une augmentation du nombre de puits forés par les agriculteurs qui utilisent de l’eau de puits pour l’agriculture. [9] En 2016, les agriculteurs de la vallée de San Joaquin ont creusé environ 2.500 puits, soit cinq fois la moyenne annuelle des 30 dernières années. Des pays tels que le Bangladesh, la Chine, l’Inde, Myanmar, le Sri Lanka et la Thaïlande ont progressé et travaillent sur des projets pilotes visant à collecter et stocker des eaux issues des inondations. [10] L’eau stockée est alors disponible pour les communautés lorsqu’elles en ont le plus besoin.
La collecte et l’entreposage de l’eau, ainsi que la mise à la disposition de l’agriculture, en particulier pendant les saisons sèches, permettront aux citoyens et aux petits agriculteurs de cultiver tout au long de l’année. Cela améliorerait encore la résilience des agriculteurs face aux aléas du changement climatique.
Si l’Afrique veut mettre un terme aux sécheresses récurrentes, elle doit prendre des décisions difficiles. En abordant les problèmes fondamentaux et élémentaires de la disponibilité à long terme de l’eau pour l’agriculture, les pays africains peuvent, une fois pour toutes, mettre fin à ce cycle de faim sans interruption.
Esther Ngumbi est chercheuse postdoctorale au département d’entomologie et de phytopathologie de l’Université Auburn, en Alabama, aux États-Unis. Elle y sert en tant que Mentor en agriculture pour la promotion 2015 de la Clinton Global Initiative University (CGI U) pour l’agriculture et est membre de la promotion 2015 New Voices Fellowship de l’Institut Aspen - une initiative visant à rassembler les experts du monde en deéveloppement autour du débat à l’échelle mondiale sur la question du développement. Elle peut être contactée à l’adresse : enn0002@tigermail.auburn.edu
www.24haubenin.bj ; L'information en temps réel