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L’économiste et ancien Premier ministre du Bénin, Lionel Zinsou, a livré une analyse lucide sur les transformations nécessaires du financement du développement en Afrique de l’Ouest. C’est ce jeudi 12 juin 2025, lors de la première journée des BOAD Development Days à Lomé (Togo).
« Est-ce qu’on est légitime à réfléchir ensemble au financement du développement ? », interroge d’entrée Lionel Zinsou. Pour le banquier d’affaires, la réponse est désormais évidente : oui.
Grâce aux efforts conjoints des États, des institutions comme la BOAD, du secteur financier et des acteurs de la production, l’Union Économique et Monétaire Ouest-Africaine (UEMOA) a la légitimité pour penser son développement de façon créative.
L’ancien Premier ministre du Bénin rappelle que l’UEMOA affiche l’une des croissances les plus fortes au monde. « On est même en fait sur le plan mondial, l’une des rares zones très résilientes. Nous avons été pendant la période du Covid-19, l’une des seules zones au monde à ne pas être en récession », a-t-il rappelé.
Malgré cette résilience, Lionel Zinsou alerte sur les limites du système financier sous-régional. Il évoque des « pathologies » qui freinent le développement. L’économiste fait part d’un excès de dépôts non transformés en financement productif. « Nous avons en Afrique subsaharienne, un système financier qui réussit à collecter beaucoup plus de dépôts qu’il ne fait de crédits. Ce qu’un système financier est normalement en charge de délivrer, c’est de la transformation où on prend des ressources d’épargne et on les multiplie et on essaye d’en faire des moyens de financement moyen terme. Vous ne pouvez pas avoir un des systèmes bancaires les plus liquides et riches en ressources en réalité très stables et les transformer en crédit court terme », a relevé Lionel Zinsou. L’ancien Premier du Bénin a aussi noté une faible orientation du crédit vers le secteur privé, qui ne capte que 11 % du PIB ; une concentration excessive sur les entreprises publiques au détriment des entreprises et de l’agriculture, de l’énergie et du logement.
Financer autrement et surtout autre chose
Pour Zinsou, il ne suffit pas de corriger les défaillances. Il faut aussi redéfinir les priorités. Il insiste notamment sur l’importance de diriger les ressources vers l’agriculture durable et l’énergie, deux piliers selon lui intimement liés et stratégiques pour la création de l’emploi. Dans une économie moderne, soutient-il, le plus grand consommateur d’énergie, c’est l’agriculture.
Lionel Zinsou plaide également pour un meilleur financement des ménages, notamment dans le logement, encore largement sous-financé, malgré une demande forte liée à la croissance démographique.
Le banquier d’affaires salue les efforts pionniers de la BOAD, qui amorce une nouvelle dynamique de financement, mais souligne que le changement ne pourra réussir qu’avec l’implication de l’ensemble du système financier africain, du secteur public comme du privé. « On va financer autrement et on va le faire avec les acteurs qui veulent le faire », a déclaré l’ancien Premier ministre béninois.
Organisée les 12 et 13 juin 2025 à Lomé, la première édition des BOAD Development Days rassemble des experts, décideurs, acteurs du secteur privé et partenaires techniques et financiers autour du financement de la transition énergétique et de l’agriculture durable.
Akpédjé Ayosso
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