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L’émission hedomadaire de la radio nationale a reçu ce dimanche Me Charles Badou, avocat à la Cour et Jean Alotounou, ancien conseiller à la Cour des comptes de l’Uemoa.
Les invités de Cécile Goudou Kpangon et Marie Léa Yemadjro ont abordé les contours de l’institutionnalisation d’une Cour des comptes au Bénin.
Depuis quelques semaines, le Bénin a adopté une nouvelle constitution. Après plusieurs tentatives, les députés de la huitième législature ont réussi à toucher la loi fondamentale en y insérant entre autres dispositions, la Cour des comptes. C’est ce qui a été ce dimanche 8 décembre 2019, l’objet du débat sur l’émission 90 mn au Bénin. Selon Jean Alotounou, ancien directeur général du trésor et comptabilité public, « Une Cour des comptes est une juridiction financière. C’est-à-dire une Cour qui contrôle les finances publiques.
La juridiction financière est chargée de contrôler l’emploi des fonds publics (collectivité territoriale, contrôle des ordonnateurs, des entreprises publiques et tout organisme privé où les fonds publics sont investis).
Charles Badou ajoute que « la Cour des comptes statue comme conseil de discipline des membres de la juridiction financière. Nous l’avons érigée du colonisateur. Elle contrôle l’effectivité et la transparence de la gestion des comptes ».
Jean Alotounou précise que « Dans certains pays, il y a une compétence particulière qui consiste à recevoir la déclaration de patrimoine des élus ».
L’institutionnalisation de la Cour des comptes n’a pas été chose aisée. Plusieurs tentantives de modification de la constitution pour y introduire cette recommandation de l’Uemoa a été vaine.
Me Badou souligne que c’est 17 ans après l’instauration de la Cour que le Bénin a pris le pas.
« Pour créer une juridiction de cet ordre, il fallait modifier la constitution. Il y a eu des tentatives plusieurs fois ». Il explique que contrairement à certains pays, le Bénin ne peut mettre en place la Cour des compte sans modifier la constitution.
« L’article 61 de la Cour de l’uemoa qui demande à chaque État de créer la Cour des compte. Dans la plupart des pays, il faut modifier la constitution d’abord », a indiqué Jean Alotounou.
C’est depuis 2002 que cette directive a été donnée. L’ancien directeur général du trésor renseigne que la chambre de la Cour ne respecte pas les normes internationales pour contrôler toutes les finances publiques.
« La création de la Cour lui donne plus de prérogative », a expliqué Me Badou.
L’avocat indique que « La Cour a déjà un président qui est nommé pour cinq ans. Des conseillers puis des auditeurs nommés parmi les magistrats, inspecteurs des finances.... Il faut que ceux qui sont nommés s’intéressent aux finances publiques ».
« Après la création, il faut la loi organique qui prévoit le rôle que cette Cour doit jouer et les prérogatives de chacun », a insisté Jean Alotounou. Concernant l’indépendance du juge, Charles Badou estime que « sur le plan du droit positif, il a tous les points pour dire qu’il est indépendant. Ce n’est pas parce que le président l’a nommé qu’il ne sera pas indépendant. C’est bien possible d’être indépendant si vous êtes nommés ». L’ancien membre de la Cour des comptes de l’Uemoa, Jean Alotounou dira qu’en ce qui est du sentiment de redevabilité qui peut empêcher l’impartialité, « On peut y penser mais le président de la Cour des comptes bien que nommé par le président dans certains pays a pris son indépendance ». Pour Me Badou « Qu’il soit désigné par le président comme ses pairs, c’est la capacité à résister aux pressions externes qui déterminera son impartialité ». Il précise que pour que la Cour soit efficace, il faut qu’elle soit animée par des spécialistes ou des sachants. Charles Badou souligne que ce sont tous ceux qui ont des compétences avérées dans ce domaine.
« A la Cour des comptes, les audiences ne sont pas publiques. Néanmoins, le public à accès à l’information. A la fin de chaque année, il y a un rapport public à travers lequel on a connaissance de toutes les décisions. Nous souhaitons que le rapport soit publié sans l’injonction du président de la République ››, a expliqué Jean Alotounou.
Charles Badou rappelle que « Si on s’en tient à la directive de l’Uemoa, il faut rendre publiques les décisions. Selon les attributions, il faut mettre les décisions à la disposition de la presse. Déjà la directive de l’Uemoa demande qu’il faut publier. Il faut préciser cela dans la loi organique. La Cour des compte n’a pas à se préoccuper des considérations politiques. Quand on veut une Cour des comptes, il faut lui donner les moyens pour qu’elle fasse son travail ».
Jean Alotounou rappelle que la saisine de la Cour peut se faire par l’État, l’auto saisine. « La Cour des comptes décide elle-même de contrôler toutes les structures où les fonds publics sont engagés ». Il y a aussi que les autorités administratives aussi peuvent saisir la Cour.
Pour lui, « La Cour ne juge pas les personnes mais les comptes. La procédure n’est pas accusatoire. Si la Cour constate des irrégularités, elle s’adresse au comptable. La procédure contradictoire est écrite. S’il n’y a pas satisfaction, la procédure continue jusqu’à ce que l’irrégularité soit établie ».
Pour Me Badou « Le juge statue sur le fonctionnement. La Cour constate des irregularités. Ce n’est pas à la Cour de prononcer les procédures pénales ». « Il appartient à la Cour elle-même d’investiguer. Lorsqu’elle est saisie, elle doit chercher les moyens de son efficacité », indique-t-il. L’avocat précise qu’il y a « une procédure contradictoire. La Cour ne rend sa décision qu’après cette contradictoire ».
« Si après la personne mise en cause retrouve un élement nouveau qui n’avait pas été ajouté au dossier, la Cour peut revenir sur la décision. Mais il est rare que la Cour se trompe sur sa décision. Elle fait un travail très minutieux », conclut Jean Alotounou.
G.A.
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