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Les 83 députés de l’Assemblée nationale, 7ème législature, ont été installés le 16 mai 2015 au Palais des Gouverneurs à Porto-Novo. Mais contrairement aux années précédentes, la cérémonie d’installation des nouveaux élus du peuple a été marquée par un incident qui entache l’honorabilité et la crédibilité de certains députés. Une affaire de corruption a éclaboussé des membres du gouvernement qui viennent d’être élus au Parlement. Une affaire qui ternit l’image de la 7ème législature.
Samedi dernier, lors de l’installation de l’Assemblée nationale, 7ème législature, certains députés ont été hués par la foule devant le palais des Gouverneurs à Porto-Novo. Les élus du peuple qui étaient dans le viseur des manifestants sont surtout les membres du gouvernement accusés dans l’affaire de détournement des milliards du fonds des Pays-Bas destinés au projet d’adduction d’eau potable et d’assainissement au Bénin.
Le ministre chargé de l’hydraulique Barthelemy Kassa a failli être aspergé d’eau par les manifestants qui scandaient « Nous avons soif ! » en brandissant des sachets de Pure water. Son collègue chargé du développement, Marcel de Souza, a été hué comme un vulgaire délinquant. Le même traitement a été fait au ministre de l’économie et des finances Komi Koutché. D’autres élus proches du pouvoir tels que le ministre des transports Aké Natondé et le député Rachidi Gbadamassi n’ont pas été épargnés par les moqueries de la foule.
Il est reproché à ces députés proches du président Boni Yayi d’être mêlés à des affaires.
Un refuge
Rosine Soglo, la Doyenne du Parlement a encore enfoncé le clou lors de la cérémonie officielle d’installation des nouveaux députés. « Il me serait désagréable de savoir que parmi vous, se cachent comme des repères, des gens qui ne sont pas très catholiques ayant des cadavres dans leur placard qui sont ici, alors qu’ils sont des fossoyeurs de l’économie nationale », a déploré l’ex Première Dame. Pour elle, le pays est pillé alors qu’il y a des gens qui n’ont pas un repas par jour. « C’est une honte que nous en sommes-là aujourd’hui », a-t-elle déploré.
« Je ne suis pas d’accord que notre institution soit le repère où des gens viennent se cacher parce qu’il y a l’immunité parlementaire pour ne pas répondre de leurs actes devant la justice. Ce n’est pas bien du tout. Nos collègues concernés doivent avoir le courage de se démettre de leur fonction. Ce serait bien », a déclaré l’ex présidente du parti la Renaissance du Bénin.
Mais les députés mis en cause ne se reconnaissent pas à travers les différentes accusations.
« Je ne suis pris dans aucun dossier », se défend le ministre de l’économie et des finances. De son côté, son collègue dont le ministère est accablé par le scandale ne manque pas d’argument : « Lorsque nous disons que nous ne sommes pas impliqués dans la gestion du dossier, on doit le matérialiser à travers un certain nombre d’actes et c’est ça qui a été fait », explique le ministre qui a démissionné du gouvernement pour s’installer au Parlement. « Lorsqu’on se retient de parler pour la crédibilité de son pays, cela ne signifie pas qu’on se reproche quelque chose. On ne se reproche rien du tout… », conclu Barthelemy Kassa.
Mais les arguments avancés pour se défendre sont loin de convaincre leurs collègues de l’opposition qui ont été accueillis à leur installation comme des héros de la résistance contre la gouvernance de Boni Yayi.
« Si quelqu’un a un procès, il n’a qu’à se rendre pour être jugé. Bien après cela, la personne peut revenir à l’Assemblée nationale, si cette personne n’a pas de part de responsabilité », suggère Claudine Prudencio, député de l’Union fait la Nation (UN).
L’autre phénomène qui met à mal les élus avec leur base est leur transhumance.
A peine élus sur une liste proche de l’opposition, certains députés ont commencé déjà par flirter avec la mouvance présidentielle. C’est le cas de certains députés de l’AND, dont trois élus auraient tourné dos à leur alliance. L’information a été confirmée par le leader de l’alliance Valentin Houdé. « J’ai appris que des camarades élus sur la liste AND ont été kidnappés, ont été volés. Quand j’ai été informé de leur disparition, je me suis mis à interroger les autres camarades et par finir, il m’a été rapporté qu’on les aurait retrouvés avec le chef de l’Etat à Parakou », a affirmé M. Houdé samedi dernier à l’Assemblée nationale.
Cette déclaration confirme aussi les informations relatives à l’achat de députés, à travers des procurations, aussi bien dans les camps de la mouvance que de l’opposition, pour l’élection des membres du Bureau du Parlement.
« J’ai l’impression que pour beaucoup de gens, l’élection du président de l’Assemblée nationale est une occasion de marché des députés. On achète, on vend des députés, ce n’est pas ça, c’est des moments de discussion, de partage. C’est pendant ces moments-là que des alliances se nouent pour être sûr que la direction de l’Assemblée sera assurée de manière sereine et à la satisfaction de tous », a expliqué Bruno Amoussou.
C’est la première fois depuis l’instauration de la démocratie au Bénin en 1990 que l’installation d’une législature est perturbée par une affaire de corruption au sommet de l’Etat. Aujourd’hui, après l’installation du nouveau Bureau de l’Assemblée, les citoyens espèrent que des mesures seront prises pour laver cette législature de ses souillures qui entachent l’image de la démocratie béninoise.
Ignace FANOU
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