(Par Roger Gbégnonvi)
Car cette date est d’ores et déjà entrée dans l’histoire politique du Bénin comme Etoile Brillante pour éclairer les Béninois sur les chemins de trac et d’abattage de toute tyrannie, rampante ou triomphante, sur les chemins de conquête et de reconquête de la liberté et des libertés. Car ce jour-là, le peuple béninois a fêté, dans une allégresse digne des phalanges célestes, les vingt-quatre ans de sa constitution démocratique. Il était devenu impossible d’attendre les vingt-cinq ans pour ‘‘faire’’ noces d’argent. Il était urgent d’exiger de l’autocrate attesté qu’il organise enfin toutes les élections en retard. On ne pouvait plus tergiverser. Et si dans la foulée on a demandé au chef de l’Etat de démissionner et de s’en aller immédiatement, ce n’est ni posture ni rhétorique, c’est tout simplement qu’il ne lui reste plus que cette option, s’il a encore le sens de sa propre dignité, s’il n’est pas ‘‘né après la honte’’ selon le mot d’un de ses compatriotes qui le prend en pitié, s’il aime encore tant soit peu le peuple béninois qui l’a tant aimé et à qui il l’a rendu et le rend en monnaie de singe, en impunité pour les assassins et les kidnappeurs, en gabegie et en dilapidation du bien public. Le chef de l’Etat a beau ne pas s’y connaître en gouvernance, comme il l’a démontré huit ans durant, sa démission ne constituait pas un objectif de la marche majestueuse du 11 décembre 2014, mais elle peut en être une conclusion logique tirée par lui-même pour soulager le peuple béninois qu’il a trahi en jetant aux orties le triple mandat, éthique, économique et social, qu’il lui a confié. Démissionner donc avant terme. Partir en hélicoptère jusqu’à Lomé. Renvoyer au peuple béninois cet hélicoptère qui est son bien, et prendre un avion dans la capitale togolaise pour une destination plus lointaine d’où on le ramènera plus tard à Cotonou pour répondre du crime de haute trahison.
S’il est hautement problématique que, dans un sursaut d’orgueil (mais n’est pas orgueilleux qui veut !), le chef de l’Etat apporte à la grandiose marche du 11 décembre 2014 l’offrande de sa démission, il est d’ores et déjà acquis que le peuple béninois, libre et déterminé, a inculqué à tout gouvernement présent et à venir une leçon de bonne conduite républicaine, à savoir : lorsque le peuple en a assez d’être trahi et s’en va pacifiquement crier sa colère sous le soleil dans la rue, l’Etat n’envoie pas la troupe le matraquer et dire ensuite de son sang versé que c’est du sang de mouton ou du mercurochrome pour désinfecter les blessures. Oui, le chef de l’Etat a proféré et laissé proférer cette outrance dans le cadre solennel du palais de la République en parlant des syndicalistes, protestataires pacifiques, ensanglantés par la troupe le 27 décembre 2013. Un an auparavant, le Chef de l’Etat avait envisagé les fosses pour recueillir le sang des Béninois. En effet, le 1er août 2012, lors de sa conférence de presse en la solennité de la fête nationale, il avait distingué les siens Béninois et les Béninois non siens, et avaient invité les deux camps à s’affronter. Dans tous les cas de figure, c’était un appel hurlant et vibrant à la guerre civile. Alertée, la Cour constitutionnelle l’a désavoué. Elle aurait dû le destituer, comme chef de clan ou de gang parvenu au sommet de l’Etat en ayant caché sa vraie nature au peuple électeur.
Il n’a pas été destitué et n’aura pas le bon sens de démissionner. Les Béninois ont donc encore seize mois de cauchemar á vivre. Stoïques, ils les vivront dans la dignité et la détermination. Sur ce chemin de douleurs, tracé pour eux par leur président rejeté, ils viennent de se donner le viatique qui leur confère la force de se dresser contre toutes les dérives et contre tous les délires, le viatique d’une journée-référence : c’était le 11 décembre 2014. Ce jour-là est née au Bénin une nouvelle conscience politique, Etoile Brillante sur les chemins de la démocratie, de la Liberté et des libertés.
www.24haubenin.bj ; L'information en temps réel
16 décembre 2014 par Judicaël ZOHOUN