L’émission Zone Franche sur Canal 3 Bénin a reçu hier, Abdoulaye Bio Tchané qui s’est prononcé sur plusieurs sujets. Qu’il s’agisse des questions liées à la gouvernance en général, à la situation économique du Bénin et à ses causes, aux réformes entreprises par le gouvernement Yayi, à sa prétendue haine avec le chef de l’Etat, à la révision de la Constitution, à la Lépi, ou aux prochaines législatives, rien n’a échappé à cet invité.

A l’entame de cette émission, Abdoulaye Bio Tchané a signifié qu’en tant que président d’une filiale de conseils œuvrant aux côtés de plusieurs dirigeants d’Etat, il reste très actif sur le continent africain. Malheureusement, nul n’est prophète chez soi. Et, il est rarement sollicité par le gouvernement en place au Bénin. Doit-on conclure à une querelle entre banquiers centraux ? Aboudalaye Bio Tchané a invité les interviewers à poser la question à ceux qui dirigent le Bénin. Toutefois, à travers des conférences économiques, a-t-il déclaré, il joue sa partition afin de sortir le Bénin de l’ornière en donnant des conseils gracieusement. A chaque occasion, il exprime son point de vue et des pistes de réflexion sur les questions de gouvernance, d’investissement, de bien être-social et de démocratie.

Gouvernance au Bénin
Selon Abdoulaye Bio Tchané, les réformes entreprises depuis 2006 par le régime Yayi n’ont pas abouti faute de consensus. « Il faut un cadre dans lequel on doit échanger » a t-il martelé. Ce cadre ne doit être réduit aux économistes, aux proches ; mais il l’élargit à tout le monde. Revenant ainsi sur le dialogue politique, l’invité a souhaité que ce soit un cadre permanent entre les forces vives de la nation et doit s’étendre impérativement aux opposants.

L’état de la pauvreté au Bénin 
C’est une préoccupation importante. C’est d’ailleurs pour cette raison, qu’il a démissionné de son poste de la BOAD pour être candidat à la présidentielle de 2011 a déclaré Abdoulaye Bio Tchané. Il est plus préoccupé par le vécu quotidien des Béninois. C’est pour cela qu’il a effectué des tournées dans plus de 60 communes du Bénin pour s’imprégner des réels problèmes de la population. A la lueur de ces analyses, on peut conclure que la pauvreté s’accroît au Bénin. En effet, 37% des Béninois vivent en deçà du seuil de la pauvreté. C’est-à-dire qu’il y a des gens qui ne mangent pas à leur faim a-t-il expliqué. Prenant l’exemple de certaines localités du centre Bénin, où l’accès à l’eau potable est un calvaire pour les populations. L’homme reconnaît que le Bénin a fait des avancées notables mais que la situation du Bénin reste déplorable. Il y a des difficultés de plus en plus grandes dans le secteur public au Bénin en matière de recrutement ouvrant ainsi la brèche au chômage galopant. La situation économique selon ses propos est extrêmement difficile. Le discours officiel est tellement emprunt de propagandes que quelques avancées suffisent pour alarmer le monde. « Tous les ans, il y a au moins 100 mille jeunes diplômés qui viennent grossir le rang des chômeurs au Bénin » selon Abdoulaye Bio Tchané. C’est une question de sécurité nationale car dans certains Etats, cela a débouché sur des émeutes et des coups d’Etat. Les jeunes désespérés constituent selon lui un danger public. Le gouvernement fait des efforts mais malheureusement insuffisants car seul il ne peut venir à bout du chômage des jeunes. Le secteur privé et l’auto-emploi doivent être sollicités en permanence. A cet effet, Bio Tchané préconise que le gouvernement crée des conditions pour développer les potentialités du Bénin en matière d’agriculture, de banque, de transit, de commerce, du tourisme et bien d’autres. « Il faut que le secteur privé soit à l’aise au Bénin…Il faut une alchimie entre le secteur public et le secteur privé pour venir à bout du chômage des jeunes » a-t-il réitéré.

Des pistes exploitables pour booster hors du Bénin le chômage
Abdoulaye Bio Tchané en tant que technocrate pense qu’il faut mettre d’abord l’accent sur la formation professionnelle des jeunes au Bénin. Il faut former des ingénieurs pour les fermes et non pour les bureaux, il faut de bons maçons et de bons menuisiers capables de travailler partout sur le territoire national, des agents touristiques et des conseillers en hôtellerie. La grande réforme dans le secteur de l’éducation doit passer par trois points à savoir former davantage, orienter les jeunes et investir dans la recherche. La méthode pour réussir selon Abdoulaye Bio Tchané est une concertation avec les enseignants, les parents d’élèves, les apprenants et les partenaires sociaux. Faute de quoi, on continuera par enregistrer les problèmes énormes dans le secteur de l’éducation au Bénin tremplin de la prospérité économique.

Le combat de l’alliance ABT pour les prochaines législatives

Abdoulaye Bio Tchané a expliqué les raisons de son absence sur la liste ABT pour les prochaines législatives. « Je veux mouiller le maillot aux côtés de mes candidats positionnés sur la liste ABT dans nos différentes circonscriptions. Ce sont des personnes bien formées, bien outillées qui partagent la vision de notre alliance » a déclaré l’invité. « J’aurais pu être candidat mais je considère que dans notre alliance, il y a des gens capables avec qui je vais travailler. Je serai sur le terrain avec eux ». Cette démarche selon Abdoulaye Bio Tchané est un enseignement tiré des dernières législatives où la liste ABT n’a pu recueillir que deux députés à l’hémicycle. Ceci en raison des divisions et des contestations issues de l’échec de l’élection présidentielle de 2011. Selon Abdoulaye Bio Tchané, c’est le manque de discipline dans le rang des candidats positionnés sur la liste ABT qui est à la base de cet échec cuisant enregistré aux dernières législatives. Abdoulaye Bio Tchané salue le multipartisme au Bénin et pense qu’il faut aller au-delà des alliances des partis pour consolider l’unité nationale. En effet, il souhaite que les gens de divers horizons se mettent ensemble avec une vision claire pour le développement du Bénin. C’est d’ailleurs la bataille au sein de l’alliance ABT selon lui.

Discorde avec Affo

Abdoulaye Bio Tchané reconnaît que des proches n’ont pu trouver de place sur la liste ABT, particulièrement Madame Affo Djobo. Dans le processus de positionnement sur les listes, des électeurs ont fait leur choix. Ainsi, dans la 14ème circonscription, les militants ont décidé de procéder par des primaires pour exprimer leur choix. C’est pour cela que Affo Djobo a perdu sa place a déclaré Abdoulaye Bio Tchané. « Je lui ai fait des propositions et même si elle s’est retrouvée sur une autre liste, je pense qu’à la fin des élections, on va se retrouver pour continuer notre lutte » a déclaré Abdoulaye Bio Tchané pour faire taire les polémiques sur ce dossier.

Vision de l’alliance ABT

Abdoulaye Bio Tchané a clairement signifié son souhait d’avoir une majorité au Parlement pour influencer les décisions de l’Exécutif. La vision des membres de l’alliance ABT se décline en trois axes. Premièrement, il s’agit de cimenter l’unité nationale. Les députés de coloration ABT vont se battre contre les dérives du régionalisme au Bénin. Deuxièmement, œuvrer pour une économie prospère en construisant des entreprises importantes. Et, enfin travailler pour que les réformes puissent aboutir sur tous les plans.

Opportunité de la révision de la Constitution au Bénin

« Il ne faut pas toucher la Constitution avant la présidentielle de 2016. On n’a pas le temps pour cela… La majorité mécanique à l’Assemblée Nationale ne doit pas être utilisée pour la révision de la Constitution. Il faut un large consensus entre les forces politiques » selon Abdoulaye Bio Tchané. L’invité a préféré ne pas rentrer dans la polémique des arguments brandis par le gouvernement. Selon lui, agiter la Cour des comptes pour réviser la Constitution n’est pas juste. Il faut mettre l’accent sur une politique qui met en confiance les bailleurs. Et, pour cela il faut mettre l’accent sur la lutte contre la corruption.

Rapports avec Boni Yayi

Sur l’état actuel de ses relations avec le Président de la République, Abdoulaye Bio Tchané a souhaité qu’on relativise les choses. Le Président de la République est une institution à laquelle l’homme a un grand respect. « J’aspire à cette fonction. J’ai l’obligation de respecter profondément cette institution. Je n’ai aucune haine vis-à-vis de Yayi Boni » a-t-il déclaré. Il peut y avoir des divergences de point de vue mais tout cela du domaine privé. Tout le reste qui se dit n’est que de vaines spéculations a-t-il conclu. D’ailleurs, l’alliance ABT est restée permanente sur les questions essentielles touchant aux fondements du Bénin en faisant des critiques constructives que ce soit sur la Lépi, sur la révision de la Constitution, sur les élections et sur la dernière gigantesque marche de l’opposition. « Je ne suis pas là pour dire que le gouvernement fait mal tous les jours ».
Plusieurs autres sujets ont été abordés. A la question de savoir si le Général Gbian ne compromet pas ses chances pour la prochaine présidentielle, il répond que historiquement plusieurs candidats dits du Nord se sont tous positionnés. « C’est à nos compatriotes de décider qui est le mieux qualifié pour les diriger. Nous sommes dans un système démocratique et je ne peux interdire à un candidat de manifester son désir d’être candidat. Aucune candidature ne me porte ombrage » a déclaré Abdoulaye Bio Tchané. Il a par la suite fait des propositions pour améliorer le secteur de la production cotonnière, pour être indépendant en matière d’énergie électrique et avoir des routes à foison dans tout le pays.

Madou Gabin HOUNSA/Le Grand Matin