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Les pays africains, dans la quête du bien être de leurs populations dans le volet santé ont consenti d’énormes moyens matériels financiers et humains tout au long du temps dans la lutte contre les maladies. Des plans d’actions se sont succédé pour donner place à une politique stratégique de lutte contre chaque maladie. Et parmi ces maladies tueuses il y’a le paludisme.
Le paludisme est une maladie infectieuse causée par 07 plasmodiums différents dont le falciparum, vivax, malaria, ovale etc. Il se transmet à l’homme par la piqure d’un moustique infecté (anophèle femelle). Une fois dans l’organisme, il attaque le foi et les globules rouges où il se multiplie rapidement. Installé, il éclate les globules rouges, ce qui conduit à l’anémie. Et si le patient n’est pas traité rapidement, les globules rouges infectées peuvent obstruer les vaisseaux sanguins qui irriguent le cerveau, on parle alors de neuropaludisme.
En Afrique subsaharienne, le paludisme apparait comme la principale cause de consultation. Il tue à lui seul et chaque année autant que le diabète le cancer, le vih et la tuberculose réunis. En 2022, selon les statistiques de l’Organisation Mondiale de la Santé(OMS), le paludisme a contaminés 233 millions de personnes et tué 580000 d’entre eux, la grande majorité étant des enfants de moins de 05 ans.
Avec un tel bilan, on est tenté de croire que les Etats africains au sud du sahara ont ’’ carrément baissé les bras’’ dans la lutte contre le paludisme. Que non ! Beaucoup a été fait et continue d’être fait à travers les Ministères en charge de la santé et les différents Programmes Nationaux de lutte contre le Paludisme. Et parmi ces efforts, on peut citer l’introduction de la prise en charge de la maladie dans le panier des différentes Couvertures Santés qui se mettent progressivement en place dans nos pays. Plus récent encore, l’achat et la livraison du vaccin contre le paludisme appelé RTS,S
Mais au-delàs de la raison et du réalisme qui voudraient que ces vaccins soient les bienvenus chez nous, et dans un autre sens, ce vaccin contre le paludisme suscite des questionnements et des incompréhensions qui n’aident pas le citoyen lamda à comprendre les enjeux et à prendre des décisions, parce que disons-le, la vaccination n’est pas encore obligatoire dans la majorité des pays africains.
D’où vient ce vaccin, est-il efficace ?
Livré en milliers de doses dans nos pays( Ghana, Kenya, Malawi, Burkina Faso, Niger, Sierra Léone, Cameroun) et parfois devant un parterre de média, le vaccin dénommé RTS,S au nom commercial de MOSQUIRIX est le premier vaccin antipaludique recommandé par l’OMS. Il est également recommandé en seconde ligne pour l‘immunisation contre l’hépatite B.
Il a été mis au point par la firme pharmaceutique Glaxo Smith Kline(GSK) qui d’ailleurs a fait don de 10 millions de doses pour les campagnes de vaccinations pilotes qui ont débuté en 2019 au Ghana, Malawi, Burkina Faso, Libéria, Kenya, le Niger, la Sierra Léone et qui se poursuivront au premier trimestre 2024 au Cameroun. Selon Kate O’Brien, alors Directrice du département vaccination de l’OMS, le RTS,S est efficace à 40% et peut réduire de 13% la mortalité des cas les plus sévères de la maladie. Selon l’OMS, MOSQUIRIX ne confère pas une protection complète contre le paludisme causé par le plasmodium falciparum. La protection du vaccin s’affaiblit avec le temps et la vaccination peut retarder l’acquisition de l’immunité naturelle. Le projet MVIP qui est chargé de l’organisation des campagnes de vaccination au niveau mondial du vaccin RTS,S est coordonné par l’OMS en collaboration avec PATH, UNICEF, et financé par GAVI, le Fonds mondial, UNITAID et bien sûr GSK.
Quelle est la composition du vaccin contre le paludisme RTS,S dénommé MOSQUIRIX ?
Ce vaccin est de la classe des protéines recombinante, il se présente sous forme de poudre blanche suspension injectable opalescent, incolore à brunâtre pâle. Une dose de MOSQUIRIX contient après reconstitution de : les antigènes - 25 microgrammes de RTS,S renforcé avec ASO1E31- une portion de la protéine circumsporozoide de Plasmodium falciparum fusionnée avec l’antigène de surface de l’hépatite B(RTS) et combinée avec l’antigène de surface de l’hépatite B(S). C’est la technologie de l’ADN recombinant qui a été utilisé. Il doit être réalisé par injection intramusculaire uniquement au niveau de la région antérolatérale de la cuisse chez les enfants âgés moins de 5 mois. Pour dire simple, ce vaccin est essentiellement composé des germes de plasmodiums falciparums et ceux de l’hépatite B inactifs. C’est la raison pour laquelle il est également recommandé pour immuniser contre l’hépatite B.
Où et comment se sont fait les essais du vaccin ?
C’est au Mozambique et dans 07 autres pays africains au sud du sahara non divulgués en 2004, 2009 et 2015 que les essais contrôlés du vaccin RTS,S ont été réalisés auprès de 8922 jeunes enfants et 6537 nourrissons âgés entre 0 et 12 semaines. Il était question d’élever les moustiques infectés par les différentes formes de plasmodium et surtout de type falciparum et ensuite les laisser piquer les cobayes. Bien sur, après avoir pris le vaccin. Tout ceci avec un suivi médical très rapproché pour des cas qui s’aggraveraient. Au finish, o4 doses ont fait l’unanimité. Ce qui signifie que le vaccin RTS,S nécessite 04 doses d’injection pour être efficace reparties ainsi qu’il suit : 03 doses dès l’âge de 5,6 et 7 mois et un dernier rappel vers 18 mois. En somme et selon les mêmes experts de l’OMS et ceux chargés des essais, le RTS,S sauverait une vie sur 200 enfants vaccinés pour une efficacité estimée à 40%. Il est utile de noter que le RTS,S est le premier vaccin contre le paludisme homologué et recommandé par l’OMS.
Combien coûte le RTS,S ?
D’après les responsables du projet (GAVI, GSK, le Fonds Mondial, Fondation Bill et Mélinda Gates etc.), tous occidentaux et vendeur du vaccin, le prix de celui-ci a été arrêté entre 1,65 et 3,30 euros par doses c’est-à-dire entre 1080 et 2160 FCFA, pour les pays africains au sud du sahara qui constituent le grand marché visé.
Ce vaccin est-il rentable et nécessaire pour nos pays en dehors des intérêts particuliers des uns et des autres ?
Si on s’en tient aux déclarations de GSK et de l’OMS qui affirment après des essais réalisés, que le RTS,S sauve 01 vie pour 200 enfants vaccinés, on peut aisément dire que le profit des porteurs du projet a été bien calculé. Si ce vaccin sauve réellement une vie sur 200 enfants vaccinés, cela revient à dire que GSK et ses partenaires pourront sauver seulement 2900 enfants sur les 233 millions de contaminés enregistrés en moyenne chaque année en Afrique, contre une rondelette somme de 100 milliards 656 millions de FCFA (233millionsx4x1080fcfa). Pour bien comprendre, disons simplement que si les pays africains au sud du sahara adoptent officiellement ce vaccin, ce qui est peut etre déjà fait, en plus de ses autres charges régaliennes, isl devront également acheter chaque année une vie de ses jeunes compatriotes auprès des porteurs du projet à un prix très élévé. Et si nos pays veulent réellement diminuer le nombre de décès dus au paludisme (580 000 en 2022) et limité les 233 millions de cas enregistrés chaque année, les pouvoirs publics devraient verser presque l’équivalent du budget des ministères en charge de la sante pris individuellement, rien qu’à l’achat de ce vaccin.
Pour répondre à la question, nous disons que l’option d’introduire ce vaccin dans les campagnes des Programme Elargi de Vaccination de nos Etats chaque année est louable, mais l’objectif sera difficilement atteint voire impossible, même en tenant compte des mécanismes d’acquisition contraignantes des vaccins de GAVI et du Fonds Mondial. D’ailleurs GAVI envisagerait ne plus financer les vaccins dans certains pays africains d’ici 2027. Ces Etats devront être prêts à passer à l’autofinancement de ses vaccins, ce qui coûtera trop cher pour un rendement très médiocre. D’ailleurs Benoit Gamain chercheur à l’Institut Pasteur de Paris et directeur de recherche au CNRS a dit ceci parlant du RTS,S ou MOSQURIX : ‘’Avec son efficacité limité ce n’est pas le vaccin idéal, cela ne va pas révolutionner la santé en Afrique subsaharienne mais il faut le voir comme une nouvelle arme dans la lutte contre la malaria’’
Y a-t-il un autre moyen d’éradiquer le paludisme en afrique en dehors du vaccin ?
Nous disons oui. La réponse est bel et bien positive. D’autres pays l’ont fait et continuent à le faire. On peut citer la Cap Vert qui d’ailleurs un de nos Etats, la Chine, la Malaisie, l’Iran, ile de la Réunion, le Myanmar, l’Azerbaïdjan, le Tadjikistan et bien d’autres. Là-bas, les autorités publiques ne font pas la magie, ils ont juste imposé des politiques réalistes de lutte contre le paludisme. Des politiques aussi vielles que le monde. Le succès de ces pays qui luttent réellement contre le paludisme repose essentiellement sur la bonne réactivité associée à la facilité d’accès aux services de santé en plus de la bonne sensibilisation des populations. Une bonne chaine de riposte sanitaire avec des structures sanitaires d’appui efficaces , la prise en charge gratuite des enfants de0 à 5 ans ; la distribution gratuite des moustiquaires imprégnées à longue durée d’action(MILDA) ; La pulvérisation permanente intra domiciliaire avec des produits à effet rémanent ; La pulvérisation par des drones des zones endémiques ; l’Organisation permanente des campagnes de prophylaxie ; le renforcement des capacités techniques des prestataires en matière de diagnostic, de prise en charge des cas et de prévention ; la bonne gestion de l’information dans le processus de veille sanitaire ; le renforcement des stocks de médicaments nécessaires au traitement des patients ; le traitement préventif intermittent(TPIN) chez les nourrissons et la sensibilisation permanente en milieu scolaire et professionnel sans oublier la refonte organique du Programme Elargi de Vaccination(PEV) et du Programme de Lutte contre le Paludisme(PNLP). Sous leurs formes actuelles, ces structures sont incapables d’atteindre les objectifs attendus.
Au vu de tout ce qui précède il est claire que les pays africains concernés peuvent s’en passer de ce vaccin qui coûte extrêmement cher au profit des mesures habituelles et peu couteuses. Notons-le, les occidentaux ne se sont pas débarrassés du paludisme grâce à un vaccin, mais par des méthodes de prophylaxie et de soins efficaces. S’ils ont réussi, nous aussi nous pouvons y arriver sans le vaccin.
Pourquoi ce vaccin est-il interdit d’utilisation en dehors des pays africains au sud du sahara et aux voyageurs ?
Les promoteurs du vaccin une fois le produit homologué et recommandé par l’OMS, attirent l’attention du grand public à travers certains avertissements : que le vaccin RTS,S est interdit d’être administré hors zone pays d’Afrique subsahariens, mais également aux voyageurs. La raison évoqué étant que Mosquririx a été élaboré par le plasmodium falciparum qui est la forme la plus tueuse en Afrique subsaharienne. Si on peut comprendre ce raisonnement, par contre il ouvre d’autres questionnements et affirmations. Ceci amène à croire que ce vaccin a été élaboré uniquement pour le grand marché Afrique subsaharien ( avec plus de 600 millions d’habitants) alors qu’on trouve ce type de plasmodium dans d’autres zones géographique du monde(Asie, Amérique latine, proche et moyens orient, les pays de l’Est de l’Europe), malheureusement là-bas le marché ne peut être très rentable à cause du faible taux de contamination, ce qui ne pourra pas faire l’affaire des promoteurs. On comprend donc pourquoi, on nous dit que ce vaccin est interdit d’utilisation dans ces autres pays mais uniquement en Afrique noire où le marché est important et la valeur ajoutée énorme. Le prétexte stupide de sauver des vies des jeunes africains toujours avancé repose sur des intérêts purement économique et financier aux profits de ceux qui fabriquent et commercialise ce vaccin. D’autant plus que, ces experts et promoteurs dudit vaccin demandent aux Etats marchés africains de combiner les méthodes classique de lutte contre le paludisme à ce vaccin. Or, nous savons tous que les outils utilisés jusqu’aujourd’hui dans la lutte contre le paludisme en Afrique subsaharienne viennent de ces pays développés concepteurs du vaccin. Qu’il s’agisse des moustiquaires imprégnées, des myriades de formes d’antipaludéens, des consommables médicaux, etc. En plus des lourdes dépenses déjà consenti par nos pays dans la lutte contre le paludisme, il faut maintenant ajouter le poids des coûts de vaccins qui sont très élevés. Donc, le fait de nous demander, nous pays noirs africains d’accepter ces vaccins peut paraitre anodin, mais lourd de significations. Cette offre apparait comme un piège pour endetter un peu plus nos Etats et les appauvrir jusqu’à la lie, sans pitié pour ses populations qui croupissent déjà dans une misère ambiante et choquante.
Très loin d’être complotiste, ce vaccin pourrait entrainer des effets secondaires importants, raison pour laquelle il est recommandé uniquement aux jeunes enfants noirs africains vivants dans ces pays. Parce que le vaccin a été fait uniquement pour eux, et non pour les autres. Mêmes les voyageurs qui migrent de pays en pays sont interdits de prendre ce vaccin comme mesure préventive contre le paludisme, parce qu’il serait dangereux pour eux, en plus qu’ils risqueraient de propager les effets secondaires sur leur parcours.
Et jusque là, cela n’attire toujours pas l’attention de nos autorités. Etonnant et vraiment surprenant !
Jean Marie MEYO